Delhaize propose une septantaine de produits équitables, dont les principaux sont le café, le thé, le sucre, les fruits et les légumes. Durant la période de Saint-Nicolas ou de Pâques, la chaîne de supermarchés vend aussi des figurines en chocolat équitable. Outre des produits de sa propre marque, l’enseigne commercialise également des douceurs, notamment d’Oxfam, de Candico et de Ben & Jerry’s. Depuis plus de 25 ans déjà, Delhaize collabore avec Fairtrade Belgium et son appui permanent au commerce durable constitue un élément essentiel de sa stratégie.
Anaïs Pauwels, Sustainable Private Brand Manager, soutient l’équipe d’achat dans sa vision durable relative aux produits, celle-ci englobant non seulement l’équitable, mais aussi le bio. Elle travaille ainsi sur des projets ayant trait à la pêche durable, l’utilisation d’huile de palme durable, les emballages écologiques, etc. Anaïs nous explique comment Delhaize développe sa gamme équitable. « Une à deux fois par an, nous recueillons le feedback des consommateurs. Nous interviewons des clients dans le magasin ou en ligne, lors de la Semaine du commerce équitable, par exemple. Fairtrade Belgium donne également un feedback sur notre gamme et nous leur demandons fréquemment si nous avons raté certaines opportunités. Nous analysons aussi le marché de notre côté. J’étudie l’assortiment proposé par nos concurrents ; quant aux acheteurs, chacun responsable d’une certaine catégorie comme le café ou le chocolat, ils suivent eux aussi l’évolution de très près. Nous réunissons toutes ces informations avant de nous mettre en quête de nouveaux produits. Ainsi, en octobre, nous avons par exemple étoffé notre gamme de thé : à la base, celle-ci comptait six sortes de thé équitable ; nous en proposons à présent plus de dix, dont quelques-unes aussi bios. »
Une grande chaîne de supermarchés telle que Delhaize remarque-t-elle aussi que le bio et l’équitable sont de plus en plus étroitement liés ? « Absolument. Nous avons toujours autant que possible combiné les deux, mais nous ne l’imposons pas à nos fournisseurs. En 2013, nous avons organisé, conjointement avec Fairtrade Belgium et nos acheteurs, un voyage en Colombie où j’ai pu constater que satisfaire aux exigences des deux certifications ne constituait bien souvent qu’un petit pas à franchir pour les producteurs. À nos yeux, cette combinaison s’avère bénéfique, puisque ces produits touchent un public plus large que les simples consommateurs en quête de produits équitables. Qui plus est, le marché du bio est aussi plus vaste ; notre offre bio est ainsi sept fois plus étendue que notre offre équitable. »
La gamme équitable n’est pas traitée différemment de la gamme classique. Par contre, la marge bénéficiaire sur ces produits doit demeurer limitée par rapport au prix minimum obtenu par les agriculteurs. « C’est bien souvent difficile. Je pense notamment au prix du café qui fluctue énormément. La situation est différente pour chaque produit. Les produits équitables ne sont certainement pas toujours plus chers ; ainsi, le marché est vaste pour le café et le thé, et donc, les prix sont identiques. Par contre, le prix est supérieur pour des produits spéciaux comme le chocolat et les ananas. Nos figurines en chocolat pour Pâques sont également un peu plus chères, mais c’est à nous d’expliquer correctement à notre clientèle le fonctionnement du système du commerce équitable, de lui faire comprendre que le supplément de prix permet de garantir un salaire minimum aux producteurs de cacao. »
Les produits à base de matières premières équitables ne se reconnaissent pas tous d’emblée à leur label. Certaines friandises renfermant du sucre de canne ne sont pas labellisées Fairtrade, parce qu’elles ne contiennent pas un pourcentage suffisant de matières premières équitables. « Certains ingrédients sont difficiles à trouver dans le commerce équitable, raison pour laquelle certains produits ne sont pas équitables à 100 %. Par contre, nous sommes toujours honnêtes dans notre communication ; nous sommes en effet obligés de mentionner sur l’emballage le pourcentage total d’ingrédients équitables. »
Les médias attirent régulièrement l’attention sur les éleveurs laitiers et porcins qui ne cessent de se plaindre, à l’instar de leurs homologues du Sud, que le prix payé pour leurs produits ne leur permet pas de nouer les deux bouts. L’heure est-elle venue pour un label Fair Trade soutenant les agriculteurs européens ? Et quelle est la position prise par Delhaize sur cette problématique ? « Nous proposons le lait Fairbel et apportons l’appui nécessaire à nos producteurs laitiers belges. Autre initiative lancée il y deux ans, le label “Mieux pour tous” a entraîné une adaptation de l’ensemble de notre gamme de viande de porc. “Mieux” ne veut pas uniquement dire que les porcs ont une alimentation variée et équilibrée, et que la viande est de meilleure qualité, mais ce terme vise aussi l’appui, tant en termes de finances que de contacts, apporté par Delhaize aux producteurs. Très concrètement, cela revient à dire que les agriculteurs doivent nourrir leurs porcs avec des graines de lin, ce qui entraîne un surcoût, compensé par Delhaize, par exemple, en concluant avec eux un contrat à long terme et en leur accordant une aide financière supplémentaire. Le projet “Mieux pour tous” a été un investissement certes lourd, mais néanmoins important, qui a contribué à une nette amélioration de la collaboration avec les éleveurs de porcs. D’autres gammes de produits seront également adaptées selon ce même principe. Pour les fruits, les légumes et la viande, Delhaize se tourne de toute façon dans la mesure du possible vers des producteurs belges. Vu les volumes dont nous avons besoin, cela ne suffit toutefois pas toujours, mais nous appliquons la règle suivante : s’ils sont disponibles en Belgique, nous achetons les produits ici. Par ailleurs, cela fait plusieurs années que Delhaize travaille à une gamme locale. Quelque cinquante produits locaux sont ainsi proposés en exclusivité par région. Notre acheteur sur place analyse l’offre régionale et conclut des accords avec les fournisseurs locaux, qui livrent directement au magasin. »
Chez Delhaize, les produits équitables ont toujours été intégrés à l’offre classique, car « si vous les mettez à part, dans un petit coin du magasin, vous ne touchez que les aficionados. Qui plus est, le client aime comparer et comprendre précisément pourquoi il débourse plus. » Lors des deux dernières éditions de la Semaine du commerce équitable, Delhaize a rassemblé tous les produits équitables pour donner à sa clientèle une vue d’ensemble de la gamme étendue et des actions promotionnelles. Et cela a été un coup dans le mille : non seulement, les clients ont découvert les produits équitables, mais en plus, ils les ont trouvés par la suite dans les rayons classiques. La Saint-Valentin (chocolat), la fête des Mères (roses) ainsi que la semaine bio en juin sont d’autres occasions de braquer les projecteurs sur les produits équitables.
Delhaize est en outre la première chaîne de supermarchés à avoir commercialisé en 1989 du café Fairtrade en Belgique. « S’il va de soi que l’attention accordée aux commerce et développement durables contribue à notre image positive, notre audace et volonté d’innovation est littéralement inscrite dans nos gènes. En 2011, nous avons pratiquement doublé notre gamme équitable en y ajoutant entre autres des friandises ainsi que des T-shirts. Nous nous sommes réellement efforcés de commercialiser plus de produits que les traditionnels bananes, sucre et thé. Parfois, cela a bien marché, et parfois pas. C’est par exemple difficile pour les bonbons, parce que le client ne fait pas toujours le rapprochement entre le sucre de canne et le commerce équitable. Cela dit, Delhaize continue d’assumer sa responsabilité et les acheteurs sont intéressés à lancer de nouveaux produits durables sur le marché. Grâce à nos figurines en chocolat pour Pâques et Saint-Nicolas, que nous proposons à la vente depuis trois ans déjà, nous nous démarquons des autres distributeurs. »
Le commerce équitable peut-il rimer avec la guerre des prix souvent rude qui fait rage entre les grandes chaînes de supermarchés et qui met les fournisseurs sous pression ? « Nous nous efforçons autant que possible de répondre à tous les besoins aux différents niveaux. Nous visons une offre de produits de qualité à un prix correct. En règle générale, nous entretenons de bonnes relations avec nos fournisseurs. Il ne nous arrive certainement pas de mettre soudainement un terme à un accord ou de ne plus vendre certains produits. Tant le nombre de produits que la vente d’articles équitables ont par ailleurs toujours connu une progression constante. Si, au début, l’attention se focalisait sur le café, ces quinze dernières années, la gamme s’est considérablement étoffée. La clientèle belge a réellement appris à la connaître, assurément les jeunes. Nous relevons que les actions menées par Fairtrade Belgium dans les écoles ont un grand impact. Ainsi, les enfants savent fréquemment mieux que leurs parents ce que représente le commerce équitable et pour quelle raison il est important. »