Au Burundi, le terme « Horamama » rappelle avant tout une chanson traditionnelle entonnée par les femmes qui se rendent au champ ou qui rentrent chez elles. Il signifie « courage » ou « puissance », et est censé leur faire oublier leur fatigue. À présent, Horamama est aussi la marque de café de la COCOCA, une union de 39 coopératives réparties sur l’ensemble du pays.
Le café est la principale culture de rente au Burundi. En 1994, le gouvernement a décidé de privatiser le secteur. Des coopératives ont vu le jour ci et là, mais elles parvenaient difficilement à subsister et à développer des services pour leurs membres. Afin de générer une plus grande valeur ajoutée, des dizaines de coopératives ont cherché, des années durant, à développer leurs propres stations de lavage. Pour accélérer ce processus, mais surtout étendre et professionnaliser la commercialisation et l’exportation de leur café arabica, elles ont créé la COCOCA fin 2012. L’union compte à présent quelque 30.000 membres caféiculteurs.
COCOCA
Grâce à l’aide apportée par plusieurs donateurs et grands clients, la COCOCA est devenue en quelques années en solide acteur sur le marché burundais du café. De 2014 à 2017, le Trade for Development Centre (TDC) a été l’un de ces donateurs. Son projet avait pour objectif de renforcer tant l’union que les coopératives la composant, et ce, à différents niveaux :
- D’importants efforts ont été déployés pour assurer une collecte et une analyse correctes des chiffres de production communiqués par l’ensemble des coopératives. Ce sont là des données essentielles qui serviront de base aux projets futurs.
- De nombreuses sessions ont été organisées afin de permettre aux responsables et aux comptables des coopératives d’améliorer la gestion financière et de mieux structurer le rapportage.
- Enfin, quatre animateurs ont été engagés – un par région – en vue d’assurer un encadrement plus intensif des membres. Quelque 2.500 agriculteurs ont suivi des formations sur des pratiques culturales durables dans l’optique d’accroître tant la qualité que le volume de production.
Croissance énorme
Si elles ne faisaient certes pas partie intégrante du projet du TDC, la construction et la mise en service en 2016 d’une usine de traitement du café ont représenté une étape importante pour la COCOCA. L’organisation est désormais capable de gérer elle-même l’ensemble de la filière, des cerises de café au café vert prêt pour l’exportation. Baptisé Horamama, le site de production est le premier au Burundi à disposer de son propre séchoir à grains. Au cours de la période 2014-2017, la vente de café est passée de 350 à 12.000 tonnes. En 2014, la COCOCA exportait 4 conteneurs de café Fairtrade provenant de trois coopératives certifiées. En 2017, celles-ci étaient déjà au nombre de 17 et 21 conteneurs ont été vendus à des conditions Fairtrade. Pour l’heure, la COCOCA représente environ 15 % de la production de café burundaise.
Coaching en marketing
Dans le prolongement de ce projet, la COCOCA a bénéficié du programme de coaching en marketing du TDC. Un coach s’est rendu en mars et en octobre 2017 au Burundi pour deux sessions d’une semaine.
Le programme de la première session comprenait une analyse approfondie de la position de la COCOCA sur le marché, en ce compris une séance de brainstorming sur les forces, faiblesses, menaces et opportunités (SWOT) pour l’organisation. Cette analyse a souligné l’importance de travailler avec d’autres sociétés sur l’image de marque du café burundais, tout en mettant suffisamment en avant les qualités propres au café Horamama. « Qualité » est le maître mot rapidement ressorti de cette analyse. Attendu que la COCOCA possède des coopératives dans l’ensemble du pays et que la qualité de sa production a fortement progressé ces dernières années, l’organisation peut à présent aussi fournir de gros volumes de différents types de cafés de qualité et de cafés premium (ce qu’on appelle les cafés de spécialité).
Au terme de la deuxième session, cet exercice de réflexion a débouché sur un ambitieux plan marketing. Ayant pour objectif l’exportation de minimum 100 conteneurs de la récolte 2018-2019, dont 60 de café certifié (principalement Fairtrade et UTZ), de café de spécialité ou de Café des Femmes (un café spécifique produit par des femmes membres), le plan prête également attention à la recherche d’un nombre suffisant d’acheteurs. Cela implique à la fois de retenir les clients existants, comme Colruyt qui, depuis des années déjà, entretient des relations commerciales soutenues avec la COCOCA, que d’en trouver de nouveaux. Afin de préparer la présence à des foires commerciales, des dépliants, un site web et d’autres matériels de communication ont été réexaminés d’un œil critique.
Chiffres
De décembre 2014 à décembre 2017, le TDC a fourni un appui financier à hauteur de 105.567,63 €. Diverses sessions de coaching se sont aussi tenues pendant cette période, notamment en marketing et en gestion financière et d’entreprise. Le trajet de marketing était de plus assorti d’une enveloppe financière de 15.000 € destinée à l’élaboration de matériel de communication.
Dusangirijambo et Nkamwa Yacu
Le projet du TDC ne s’est pas borné à l’union de coopératives ; deux sociétés membres ont elles aussi bénéficié d’un appui distinct.
La première, Dusangirijambo, se situe dans le nord-est du pays. Les collaborateurs et membres de cette coopérative ont bénéficié de différentes formations portant sur l’agriculture biologique et la gestion d’entreprise. Trois pépinières ont été créées pour produire des plants de café et des arbres d’ombrage. Des haies destinées à contrer l’érosion des sols sur les collines ont été plantées avec l’appui de la communauté locale. Grâce à tous ces efforts, la coopérative a, outre sa certification Fairtrade, aussi décroché une certification Rainforest ; quant au nombre de membres, il est passé de 200 à 1.300.
Les résultats engrangés par le projet ont été très positifs, tant sur le plan quantitatif (la production a progressé de 100 à 850 tonnes) que qualitatif (le pourcentage de café de bonne qualité a connu une hausse considérable). L’objectif recherché demeure une certification bio, soit la meilleure garantie d’obtenir de meilleurs prix.
La coopérative Nkamwa Yacu se situe dans la même région. Le projet soutenu par le TDC visait, pour l’essentiel, la production d’engrais bio. Divers sites de compostage ont été mis en place et les agriculteurs ont reçu une formation sur la production et l’utilisation de compost. Des haies ont été plantées sur pas moins de 20 km pour protéger les sols de l’érosion. Au cours de la première année du projet, la production de café a augmenté, avant de reculer la deuxième année, les agriculteurs ayant planté moins de café suite à la crise politique dans le pays et à la chute des prix du café.
Chiffres
De décembre 2014 à décembre 2017, le TDC a fourni un appui financier à Dusangirijambo à hauteur de 35.669,98 €. De décembre 2014 à décembre 2016, Nkamwa Yacu a pu compter sur un appui financier à hauteur de 34.891,70 €.
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