ECOOKIM: à la rescousse de 12.000 producteurs de cacao en Côte d’Ivoire

 En Côte d’Ivoire, le pays du cacao par excellence, ECOOKIM (Union des Sociétés Cooperatives Kimbê) fait à juste titre figure de pionnière. Fondée en 2004, cette coopérative est une union nationale qui regroupe entretemps 23 coopératives locales réparties dans les différentes régions cacaoyères du pays.

ECOOKIM défend les intérêts de pas moins de 12.000 des producteurs de cacao les plus défavorisés. Sa mission consiste à améliorer la qualité de leur cacao, de sorte à leur permettre de conquérir le marché international. Certifiée Fairtrade en 2010, la coopérative a, peu de temps après, également décroché les certifications UTZ et Rainforest Alliance.

ECOOKIM se concentre bien entendu, en premier ressort, sur ses tâches clés économiques : à travers des formations, des projets et l’octroi de prêts, elle fournit un appui technique à ses membres, afin de leur permettre d’accroître leur productivité et leur rendement, et de rechercher activement des opportunités d’exportation, et ce, tant auprès de clients équitables que non équitables. Mais elle remplit aussi un rôle social majeur. Ainsi, elle a déjà construit plusieurs écoles, postes de santé et puits, et a mené des actions de sensibilisation des communautés au paludisme et aux problèmes environnementaux. ECOOKIM et son réseau de coopératives membres emploient aussi plus de 200 personnes.

Travail des enfants

S’il est un domaine dans lequel ECOOKIM a également tenté de jouer un rôle de pionnier au cours de la décennie écoulée, c’est bien celui de la lutte contre le travail des enfants. Selon les chiffres les plus récents, près de 1,2 million d’enfants, dont 100.000 enfants esclaves, travaillent toujours dans des plantations de cacao en Afrique de l’Ouest. Cet état de choses résulte malheureusement de la misère endémique dans laquelle vivent les producteurs de cacao. Aussi, tous les membres d’ECOOKIM sont tenus de signer une charte stipulant que les enfants ne peuvent travailler dans les plantations qu’à la condition qu’ils soient scolarisés. ECOOKIM a par ailleurs érigé elle-même de petites écoles dans certaines communautés, grâce entre autres aux primes Fairtrade et Tony’s. Cette dernière constitue une prime additionnelle octroyée par l’entreprise néerlandaise Tony’s Chocolonely en sus de la prime Fairtrade. Dans le secteur du cacao, Tony’s fait figure d’exception à la règle : de groupe d’action contre le travail des enfants, l’organisation est devenue un producteur commercial de chocolat au message clair et fort : « ensemble, nous rendrons le chocolat 100 % libre d’esclavage ».

Deux des quatre coopératives ivoiriennes fournissant du cacao à Tony’s Chocolonely sont membres d’ECOOKIM. Tony’s et ECOOKIM y mettent en œuvre le système de suivi et de remédiation du travail des enfants CLMRS (Child Labour Monitoring & Remediation System) de la Fondation ICI (International Cocoa Initiative), qui entend former et confier à des membres des communautés la mission de signaler tous les cas de travail des enfants. Les parents, la coopérative et l’ICI recherchent ensuite ensemble des solutions. Nestlé adopte elle aussi le système CLMRS, communément reconnu comme le seul système évolutif existant à ce jour pour s’attaquer à ce problème.

Une aide de la Belgique

En 2017, ECOOKIM s’est vu attribuer une aide financière du Trade for Development Centre (Enabel), destinée à un projet très concret de mise à niveau de la qualité des fèves de cacao produites par trois coopératives membres situées dans des régions reculées. Il s’agissait plus concrètement des coopératives CNB, COOPAPIG et KANWORI. Leurs récoltes précédentes contenant un trop grand nombre de fèves germées ou moisies, plusieurs chargements destinés à l’exportation avaient été refusés.
Dans l’optique d’améliorer la qualité, les efforts ont porté sur deux volets :

  • 300 membres sélectionnés ont été formés à mieux maîtriser les différentes étapes post-récolte dans les villages, à savoir la collecte, la fermentation, le séchage, le stockage et le conditionnement en sacs de jute. Un des aspects qui ont été significativement améliorés à cet égard est par exemple l’intervalle entre ces différentes étapes. Les cacaoculteurs ont suivi quatre sessions, avant de bénéficier d’un accompagnement assuré par ECOOKIM et des agents du Conseil Café-Cacao, un service public ivoirien. L’objectif est ensuite bien entendu que les producteurs ainsi formés transmettent leur nouveau savoir aux autres membres de la coopérative.
  • Des formations et du matériel supplémentaires ont été fournis, au sein des trois coopératives, aux « analyseurs », c’est-à-dire aux responsables des contrôles de qualité des fèves de cacao. Les contrôles se sont dès lors améliorés tant dans les villages que dans le laboratoire de chacune des coopératives.

Résultats

La première récolte suivant l’année de mise en œuvre du projet comptait 40 % de fèves de cacao de CNB et COOPAPIG propres à l’exportation, un chiffre bien supérieur aux campagnes précédentes. Seule la coopérative KANWORI n’avait pas suivi le rythme, en raison, entre autres, de l’âge de ses cacaoyers. L’avancée la plus importante était néanmoins la nette amélioration de la qualité enregistrée chez les 300 producteurs sélectionnés, la moitié d’entre eux ayant fourni des fèves classées Grade I. Cela est de bon augure pour l’avenir, étant donné qu’ils partageront les connaissances acquises au sein de leur communauté.

Aussi, aux yeux d’ECOOKIM, la conclusion qui en découle est que la formation, assortie d’un suivi, constitue la meilleure voie vers un cacao de qualité et, partant, l’accès au marché. Une conclusion qu’elle ne manque pas de souligner en invitant systématiquement les responsables des autres coopératives à la mise en place des laboratoires de contrôle de qualité. À l’issue du projet, ECOOKIM s’est engagée à assurer la continuité de l’encadrement avec une partie des primes Fairtrade. L’organisation nourrit en outre l’ambition de se lancer à l’avenir également dans la production de chocolat.

Le projet en chiffres

De décembre 2016 à décembre 2017, le TDC a fourni un appui financier à hauteur de 43.495,59 €. Les bénéficiaires directs du projet étaient les 300 membres sélectionnés dans les trois coopératives COOPAPIG, CNB et KANWORI qui ont suivi la formation ; indirectement, le projet a touché 2.356 producteurs, y compris leur famille. 

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