Situé en plein cœur du quartier des Sablons, BeFre a déménagé depuis peu de l’ancien Palais du vin de style Art déco, les Ateliers des Tanneurs. Depuis 2007, BeFre s’investit dans la durabilité et l’écologie en se spécialisant dans la fabrication de sacs et d’emballages réutilisables personnalisés.
Il y a de fortes chances que vous ayez déjà eu entre les mains un sac de BeFre, puisque l’entreprise compte de nombreux gros clients, et ce, tant en Belgique que dans les pays voisins. Le sac Les Petits Riens ? Fabriqué par BeFre. De même que les solides sacs en propylène distribués par les supermarchés ou les grandes chaînes de magasins. Ou encore les sacs à provisions des marques « vertes » telles que The Barn, Bio-Planet ou The Färm, ou des associations comme le WWF, réalisés quant à eux en coton équitable.
À l’origine, BeFre fabriquait des sacs réutilisables en polypropylène, mais, pour l’organisation, cette matière n’était pas suffisamment durable. Aussi, l’entreprise s’est tournée vers des sacs réalisés pour 80 à 100 % à partir de bouteilles PET recyclées. De là au coton équitable, il n’y avait plus qu’un pas. « Nous avons toujours pensé que le coton était une matière naturelle, biodégradable, mais nous avons déchanté quand nous avons appris qu’il faut 70 litres d’eau pour fabriquer un seul T-shirt ! De quoi remplir toute une baignoire ! De plus, l’usage de pesticides est largement répandu dans ce secteur. C’est pourquoi nous avons choisi le bio et l’équitable, et que nous travaillons aujourd’hui avec FAIRTRADE et Bio Équitable. »
Les sacs à provisions, housses pour costume et trousses de toilette de BeFre sont bio, mais pas tous équitables. C’est une question d’offre et de demande, nous explique-t-on. BeFre reconnaît que, pour leur part, ils avaient surestimé la demande de sacs équitables. « Notre entreprise existe depuis douze ans maintenant, et nous ne voyons pas vraiment d’augmentation de la demande de sacs en coton équitable. Les produits équitables sont certes beaucoup plus chers et c’est la crise, mais je crois surtout que les consommateurs font plus attention à leurs dépenses et veulent réutiliser plus et jeter moins. Dans les années 70 et 80, tout était en plastique ; aujourd’hui, nous voulons des matières ayant une durée de vie de plus de vingt minutes. »
Ecologie
Si BeFre mise sur des matières réutilisables, c’est qu’ils veulent aller au-delà de la consommation pure et simple. Ils sont les premiers à affirmer qu’ils n’ont pas réinventé la roue. « Nous pensons toujours à nos grands-parents qui partaient au marché avec leur panier. Nous, nous avons choisi une autre matière et en avons fait un article promotionnel. Au début, nous avions du mal à convaincre les clients, car ils ne songeaient qu’à la différence de prix avec un sac en plastique. Aujourd’hui, ils ont compris que ce qu’ils paient est en fait une campagne promotionnelle : ces sacs se remarquent, s’utilisent longtemps et sont bons pour l’image de l’entreprise, puisqu’ils démontrent que celle-ci s’engage pour la préservation de l’environnement. »
D’où vient cette préoccupation écologique ? Il y a huit ans, le fondateur, Bernard Holvoet, a voyagé en Asie en sac à dos. Partout, il voyait des sacs en plastique abandonnés le long des routes ou accrochés aux arbres. Il était dégoûté. Quand il a ensuite visité l’Australie, il été frappé par l’absence totale de pollution plastique, car seuls les sacs réutilisables y sont employés. C’est ce qu’il souhaitait voir en Belgique aussi. BeFre a commencé au bon moment, car en 2007, une nouvelle loi a été promulguée sur l’utilisation des sacs en plastique.
Pour BeFre, l’équitable est indissociable du bio. L’entreprise a donc été particulièrement déçue que Fairtrade n’ait pas agréé à sa demande d’un label qui combine les deux philosophies. Cela les a rendu très sceptique sur cette organisation. « Nous devons lui payer un droit de licence ainsi que 2 % sur le chiffre d’affaires. Chaque année, les frais excèdent les revenus, car la demande de sacs équitables reste faible. Nous avons donc déjà songé à tout arrêter, mais, malgré tout, nous voulons continuer à offrir ce produit. »
Transparence
Le principal problème, estime BeFre, réside dans le manque de transparence. « Nous serions très heureux si nous pouvions recevoir, en fin d’année, un rapport précisant le bénéfice réalisé par Fairtrade Belgium et la part qui en a été allouée respectivement au contrôle et aux investissements durables. » L’association française Bio Équitable – qui combine donc le bio et l’équitable – est bien plus convaincante aux yeux de BeFre. « Elle est plus présente sur le terrain et entretient une communication ouverte. Nous avons reçu des tas d’informations ainsi que des photos d’écoles construites par des ONG locales. Elle conclut des partenariats avec les producteurs et sait donc exactement d’où provient le coton. Le site affiche une carte des pays où celui-ci est cultivé. C’est ce type de transparence que nous souhaitons offrir. »
Ceci étant, BeFre collabore quand même avec Fairtrade Belgium, qui s’avère moins cher, mais ils rêvent de trouver une manière d’informer le client sur le processus de production, à l’instar de ce qu’ils ont vu récemment dans un documentaire consacré à une entreprise française de confection de T-shirts. « Chaque T-shirt a son propre code, et lorsque vous l’encodez sur leur site, vous obtenez un aperçu de la chaîne de bout en bout. C’est le principe même du commerce équitable : les consommateurs qui optent pour l’équitable ont le droit de savoir d’où proviennent les produits et pourquoi ceux-ci reviennent plus cher. »
BeFre aussi joue la transparence sur son label CO2 : « Nous contrôlons tout, à toutes les étapes. Nous collaborons avec CO2 Logic qui calculent la compensation requise pour la production et le transport de nos sacs. Nous y affectons une partie de nos bénéfices, tout en préservant notre compétitivité. Notre marge n’est certes pas grande, mais nous restons fidèles à notre principe. »
Long terme
BeFre reçoit surtout des commandes et agit, en tant que spécialiste des produits en matière recyclée, comme intermédiaire entre le client final et le producteur. Les sacs en coton et en jute sont fabriqués en Inde, les produits en d’autres matières en Chine. Tous sont finis et imprimés avant d’être acheminés vers le port d’Anvers. Par ailleurs, BeFre dispose aussi d’un stock de sacs en jute et en coton pouvant être imprimés, en Belgique cette fois, selon les souhaits du client. BeFre se voit comme un intermédiaire entre le client européen et le producteur asiatique : « Si nous basions la production en Europe, elle reviendrait dix fois plus cher et personne ne voudrait de nos sacs réutilisables. Travailler avec des producteurs asiatiques n’est néanmoins pas toujours simple ; c’est une tout autre culture. Il faut pouvoir leur faire confiance et disposer de suffisamment de réserves pour tout préfinancer ».
Les sacs fabriqués en Extrême-Orient sont-ils équitables de A à Z ? « Certains des fournisseurs avec lesquels nous travaillons cultivent eux-mêmes le coton qu’ils utilisent pour les sacs, tandis que d’autres l’achètent à des agriculteurs équitables. Nous collaborons directement avec plusieurs entreprises, mais il se peut qu’à leur tour, celles-ci travaillent avec d’autres petites entreprises. Nos fournisseurs détenant en tout cas le label équitable, nous comptons bien qu’un contrôle soit effectué, puisque nous payons pour ce label. Mais de là à savoir s’il est correctement réalisé, c’est difficile, puisqu’ils ne nous remettent pas de rapports. En ce qui concerne les fabricants asiatiques de nos sacs, ils ne sont qu’au nombre de cinq, donc nous les connaissons tous. Nous leur rendons visite deux fois par an et savons donc pertinemment comment ils fonctionnent. Nous le faisons autant par acquit de conscience que pour la réputation de notre entreprise. Nous tenons à nous assurer qu’aucun enfant n’y travaille et que les security lines et filtres requis ont été mis en place. »
« Cette philosophie sera estimée à sa juste valeur à long terme, nous n’en doute pas un instant. Elle ne fait pas gagner des masses d’argent, mais procure un sentiment de satisfaction. Cela fait douze ans maintenant que nous avons lancé cette initiative et chaque semaine encore, nous nous en félicitons. Certes, nous pourrions faire plus, et produire plus, mais nous nous devons de respecter notre philosophie. Sans quoi, bien des clients seraient déçus. »
Depuis février 2019, BeFre s’est affilié à une société française, Glory (www.glory.fr), spécialisée dans les sacs et coffrets réutilisables en papier afin d’étendre sa philosophie sur le territoire français. Tout comme BeFre, Glory met au cœur de son activité l’écologie avec son certificat FSC (certifiant que le papier est issu de forêts gérées durablement) et en cours de certification pour obtenir le label CO2 neutre.